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NES REGU

LIERS DE

VIGNES.

CHANOI l'Evangelifte. Il femble que cet Ordre n'avoit que ces deux Prieurés en France; car felon le Catalogue des Abbés de ce SJEAN DES Monaftere que Meffieurs de Sainte-Marthe ont donné,Barthelemi de Gortion foxante & huitiéme Abbé, vifita les Prieurés de Semur & de Senlis qui estoient en France, & les reforma. L'Empereur Arnoul est marqué dans le nombre des Abbés. au même Catalogue; mais il n'eft pas fidelle, & on n'y peut pas ajoufter beaucoup de foi.

CHAPITRE XII. ·

Des Chanoines Reguliers de faint Jean des Vignes
à Soiffons.

L

'ABBAYE de faint Jean des Vignes à Soiffons fut fondée par Hugues Seigneur de Chateau-Thierry l'an 1076: fous le regne de Philippés premier Roi de France. Cet Hugues aïant ufurpé plufieurs Eglifes avec les biens qui en dépendoient, touché de repentir alla trouver Thibaud Evefque de Soiffons pour les lui remettre entre les mains, à condition que l'r glife de faint Jean, qu'on appelloit pour lors du Mont, fituée dans la Ville de Soiffons, & qui eftoit celle qu'il avoit injustement retenuë, feroit deffervie par des Chanoines vi→ vans en commun; & que les autres Eglifes avec les biens qui en dependient, & dont il avoit auffi eu la joiffance y fe& roient unis. Le Roi approuva cette fondation la même année; & l'an 1088. Hugues croïant n'avoir pas affez fatisfait à fa confcience touchant fon ufurpation fimoniaque, fit don au Monaftere de faint Jean, de trente arpens de vignes qui estoient aux environs, d'où eft venu le nom de faint Jean des Vignes que ce Monaftere a porté jusqu'à prefent. Cette fondation fut approuvée par l'Evefque Henri, qui voulant encore favoriler ces Chanoines Reguliers, leur donna une Prebende dans l'Eglife Cathedrale du confentement de fes

Chanoines.

Odon fut le premier Abbé qui après avoir gouverné ce Monaftere pendant treize ans, mourut l'an 1088. & eut pour Succeffeur Roger, auquel Urbain H. adreffa l'année fuivante un Bref, par lequel il le reçut lui & fes Chanoines fous la pro

T. IL. P.84.

Chanoine Régulier de Jean des Vignes.

16.

VERSIDAD CEN

BIBLIOTE

DEREC

!

NES REGU

VIGNES

tection du faint Siege, & approuva les Conftitutions qui CHANOI avoient efté dreffées pour cette Abbaïe, ordonnant qu'elles y LIERS DE feroient inviolablement obfervées. Il confirma toutes les do- S. JEAN DES nations qui leur avoient esté faites, & on leur en fit plufieurs dans la fuite. Hugues Seigneur de la Ferté-Milon, & Helmide fa femme, leur donnerent la Chapelle de faint Vulgis dans leur Chasteau, à condition qu'il y auroit toujours pour le moins trois Chanoines pour la deffervir. Thibaut Comte de Champagne, leur fit don auffi l'an 1122. du Prieuré d'Ouchy, après en avoir fait fortir les Chanoines Seculiers. Buchard Evefque de Meaux, fit auffi fortir des Chanoines Seculiers du Prieuré de la Ferté-Gaucher » pour le donner à l'Abbaïe de faint Jean des Vignes. Ils ont encore deux autres Prieurés, fçavoir Montmirel & la Ferté-fous-Jouares, & plus de trente Paroiffes; & quoique les Benefices qui font poffedés par les Chanoines Reguliers, foient appellés Prieurés, il n'en eft pas de mefme parmi les Chanoines de faint Jean des Vignes, qui felon l'ancienne tradition de l'Abbaïe, n'ont que cinq Prieu-rés qui lui foient annexés, & aufquels ils donnent ce nom à caufe qu'anciennement ils eftoient poffedés par des Chanoines Seculiers. On ne laiffe pas neanmoins de donner le titre de Prieurs aux Curés qui deffervent les Paroiffes.

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Le Pape Lucius III. par un Bref adreffé à l'Abbé Hugues, leur permit de mettre dans chacune de ces Paroiffes trois ou quatre Chanoines pour le moins le mefme Abbé Hugues aïant voulu revoquer à fa volonté les Chanoines qui eftoient pourveus de Cures, & en aïant fait revenir quelques-uns dansle Cloître, l'Evefque de Soiffons, Nivellon, s'y oppofa, à caufe qu'en qualité d'Evefque Diocefain, il leur avoit confié le foin des ames dont ils devoient lui rendre compte. Ils remirent leur different entre les mains du Pape, & firent tous deux à cet effet le voïage de Rome. Urbain III. qui gouvernoir pour lors l'Eglife univerfelle, leur donna des Commiffaires qui deciderent en faveur de l'Abbé mais les Chanoines de faint Jean des Vignes appellerent de leur Jugement au Pape, difant que leur Abbé n'avoit pu fans leur confentement faire cette innovation qui eftoit contraire aux Privileges qui leur avoient efté accordés par plufieurs Souverains. Pontifes qui leur avoient permis de refter trois ou quatre Religieux dans ces Cures, dont l'un feroit feulement prefenté à l'Evefque

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LIERS DE

GNES.

CHANOI pour avoir la conduite des ames, & lui en rendroit compte, & qu'à l'égard de la difcipline reguliere, ils devoient l'obeifS. JEAN fance à l'Abbé. Hugues eftoit ami d'Eftienne de Tournai, DES VIS- qui eftant de mefme fentiment efcrivit en fa faveur à Rome, mais la recommandation de ce fçavant homme n'euft aucun effet, & les Chanoines furent maintenus dans leurs droits, & on ne peut les faire fortir de leurs Benefices, ni les rappeller dans le Cloître, que pour de grands crimes: ce qui eft de fingulier dans cette Congregation, c'eft que ces mefmes Beneficiers affiftent à l'election du Grand Prieur de l'Abbaye de faint Jean des Vignes, n'y aïant plus prefentement qu'un Abbé Commendataire, & qu'ils peuvent mefine eftre élus: mais cette fuperiorité ne dure que trois ans, trois ans, après lefquels ils retournent à leurs Benefices.

Les peines qu'on impofoit aux Apoftats, qui font raportées dans les Chroniques de cette Abbaye, font bien connoistre quelle eftoit l'obfervance eftroite que l'on gardoit dans cette Congregation. Sous le gouvernement de l'Abbé Matthieu de Cuizy, un Religieux Apoftat s'eftant prefenté pour fubir la peine de fon crime, il vint à la porte de l'Eglife dans l'habit qu'il avoit porté dans le monde; l'aïant depouillé jufquà la chemife, il marcha nuds pieds, la tefte decouverte, & tenant une baguette à la main, traverfa toute la cour, & eftant arrivé au Chapitre, il fe mit à genoux, demandant, les larmes aux yeux, pardon à l'Abbé en presence des Religieux, & fuppliant qu'on lui donnaft la difcipline: ce qui aïant efté fait par le Prieur, on lui enjoignit pour penitence qu'il recevroit tous les jours la difcipline, & qu'il fe prefenteroit à cet effet: que pour toûjours il feroit privé de voix dans le Chapitre: qu'il n'auroit place, foit au Choeur ou ailleurs, qu'après les Novices, & au dernier lieu : qu'il ne celebreroit point la Meffe: qu'il mangeroit à genoux fur un petit banc au Refectoire: qu'on ne lui prefenteroit que du pain noir & du vin rouge, avec un potage, à moins que le Prieur ne vouluft bien lui envoyer quelque chofe de ce qu'on lui auroit prefenté. Il für difpenfé au bout de fix mois de manger à terre: mais tant qu'il vecut, il ne mangea qu'à la troifiéme table, qui eftoit celle des Convers. Au bout de deux ans on lui permit de dire la Meffe en particulier, mais jamais en public, & les autres peines lui furent impofées pour toûjours.

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