CHANOINES REGULIERS DE LA GATION DE Le malheur des Commendes fuc une fuite & une punition de ces desordres, & l’Abbaïe de saint Vincent y fue assujettie CONGRE, des premieres ; le dereglement dans lequelon y yiyoit en 1492. fut li grand,que le Parlement de Paris fut obligé d'en prendre connoissance. Il estoit plus grand en 1595. Il y eut des Commissaires nommés pour y faire une vifite dans les formes ; & tous ces desordres n’approchoient pas encore de ceux qui y regnoient lorsque le Reverend Pere Faure y prit l'habit en 1614. Ce jour' fi faint & fi heureux pour lui , ne fut, pour & ainsi dire , qu'un jour de débauche & de profanation pour les autres qui assisterent à cette ceremonie. On vit dans ce faint lieu des festins , des danses , & d'autres divertissemens, Les Femmes mangerent avec les Religieux dans le Refectoire , elles entrerent par tout , joüerent dans les Cloistres & dans le Chapitre ; & ce ne fut qu'un jour de licence & de desordre. Le jeune Novice estoit pendant tout ce tems-là enfermé dans sa Cellule. On ne le vit paroistre que lorsqu'il fallut aller à l'Office, & il ne parla à ses parens sur le soir, que pour leur dire adieu. Comme ce n'est ici qu'un petit abregé de sa vie, je ne rapporterai point toutes les mortifications qu'il exerça sur fon corps , & celles qu'il eut à souffrir de la part des Religieux, qui vivant dans le libertinage , ne pouvoient voir sans rougir de honte la vie exemplaire qu'il menoit, & les austerités qu'il pratiquoit ; & sans l'autorité de l'Evefque de Rieux Abbé de cette Maison , & dont les Religieux dépendoient à cause de certains avantages temporels qu'ils esperoient pouvoir obtenir de lui , le jeune Novice eur esté renvoïé chez les parens. Enfin l'année de probation estant finie , il prononça ses Vaux le premier jour de Mars 1615. tout s'y passa à l'égard des Religieux comme à la prise d'habit ; mais à l'égard du nouveau Profez , il redoubla son zele & la ferveur. Il ne fongea plus qu'à s'aquitter de ses obligations, & quelque tems après il vint à Paris pour y finir ses études. Il fic lon cours de Philosophie sous François Abra de Raconis , qui fut depuis Evefque de Lavaure; & après avoir reçu à la fin le bonnet de Maistre és Arts, il étudia en Theologie fous Philippes de Gamaches, & André du Val. Il fit un merveilleux progrès fous de si habiles Mailtres ; de forte qu'au bout de deux ans ils le contraignirent de prendre le degré de Bachelier. Il fuc ܝ NES REGU. CONGRE 3 GATION DE forcement follicité de continuer ses études afin de paser jul- CHANOL , put pour continuer ses étu. , suivies par celle de ce mesme Prieur en moins d'un an, furent ce qui donna entierement naissance à la Reforme. On chercha dès lors des mesures pour y parvenir; & quoique le Pere Faure n'eust encore aucune Charge, ni aucun Caractere, parce que fon âge ne le lui permettoit pas ; c'estoit néanmoins par ses avis que furent dresfés la plufpart des Reglemens necessaires, & des pratiques qui ont depuis lerviau grand Ouvrage de la Re forme ; & un des principaux Articles , fut qu'à l'avenir les Prieurs seroient triennaux au lieu qu'auparavant ils estoient perpetuels. Lorsque ces Reglemens eurent esté dressés, les Religieux folliciterent fi fort le Pere Faure, pour prendre l'Ordre de Prestrise, qu'il ne pur s'en défendre. Ce fut le 22. Septembre de l'année 1618. qu'ille reçur des mains du Cardinal de la Ros chefoucaur. On lui donna ensuite le gouvernement de cette Maison , & Dieu versa une fi grande abondance de Benedictions sur les travaux que cette Abbaïe répandit par tout une odeur de fainteré qui lui acquit autant d'estime, qu'elle s'estoit attirée de blâme. Il vint de toutes parts des personnes de tout âge & de coures conditions pour embrasser la vie Religieuse dans une fi fainte Compagnie. Ony voïoit souvent venir des Religieux de plufieurs Maisons pour y obferver la regularité , s'instruire des veritables devoirs des Chanoines Reguliers , & apprendre fous la conduite du Pere Faure les regles de la vie fpiricuelle. ) Bbb iij NES REGU- y و GATION DE FRANCE. CHANOI Le Reverend Pere Pierre Fourier Curé de Mataincourt trą. vaillant pour lors à lą Reforme des Chanoines Reguliers de CJNGRE- Lorraine, y enyoïa exprès un Religieux , qui fut depuis Ge. neral de la Congregation, pour s'instruire des Reglemens de cette nouvelle Reforme, & pour consulter ceux qui l'entreprenoient. L'Abbaïe de Nostre-Dame d'Eu y enyoïa austi quatre Novices , pour y estre élevés dans la regularité. Enfin le Cardinal de la Rochefoucaur aïant esté fait Abbé de fainte Gene. yieve du Mont à Paris en 1619. &aïant refolu de la Reformer & de la mettre sur le mesme pied qu'estoit celle de faint Vincent de Senlis , il crut qu'un des moiens dont il pouvoit se feryir pour cela , estoit d'obliger quelques Religieux de cette Abbaïe d'aller à faint Vincent pour voir ce qui s'y passoit , & pour y prendre l'idée d'une vie Reguliere. Nous avons montré en parlant des Chanoines Reguliers de saint Victor, comme ce Cardinal avoit tâché de relever les an ciennes Congregations ; mais n'aïant pas réülli dans fondes, , sein, c'est ce qui lui fit naître la pensée d'en ériger une nou, velle , dont son Abbaïede sainte Genevieve a toujours esté le Chef, quoi qu'elle ne soit que la troisiéme qui reçur la Reforme , qui avoit esté auparavant introduite dans celle de saint Jean de Chartres ; & nous rapporterons en peu dę mocs l'Ori, gine de cette celebre Abbaïe. Elle fut fondée par le Roi Clayis au commencement du fixiéme siécle vers l'an sii. à la priere de la Reine Clotilde son Epouse, qui avoit procuré la converfion de ce Prince, & à qui toute la France eft redevable de la foi Catholique. L'Eglise fut confacrée par faint Remi en l'honneur des Apostres saint Pierre &'faint Paul, dom elle recint les noms jusqu'à ce que fainte Genevieve y aïant efté enterrée ; on ajouta celui de cette fainte à ceux des saints Apostres. Mais la ville de Paris, aïant reconnu cette petite Bergere pour sa Patrone,& le Roïaume de France aïant experimencé dans plusieurs occafions par des miracles visibles la protection decette sainte Vierge ; cette Eglife n'eft plus connuë presentement que sous le nom de cette illustre Patrone de la Capitale du Rožanme de France. Clovis y aïant mis d'abord des Chanoines Seculiers, ils s'acquitterent de leurs obligations pendantun tems considerable, jufqu'à ce que les Normands n'aïant pu prendre Paris en 845: & 846. fe contenterent de saccager les Fauxbourgs. Leur GATION DE cruauté n'aïant pas épargné ce saint lieu, ils le pillerent par CHANOK deux fois ; de forte que les Chanoines aïant elté obligés de LAURS DE LA prendre la fuite , le service divin ne s'y fit plus avec tant d'e- CONGRExactitude. Ils tomberent insensiblement dans le relaschement, FRANCE. qui s'augmenta beaucoup dans la suite principalement dans le douziéme liécle qu'ils en furent chassés", & i'on mit en leur place des Chanoines Reguliers , y aïant donné lieu par le Icandale qu'ils cauferent , lorsque le Pape Eugene III. alla dans leur Eglise l'an 1148. Ce Pontife qui estoit Religieux de l'Ordre de Cisteaux & disciple de faint Bernard, avoit esté élu pour Chef de l'Eglise universelle après la mort de Lucius : 11. l'an 1145. une fedition qui s'éleva aussi-tôt à Rome l'obligea d'en sortir avec les Cardinaux, qui le couronnerent au Monastere de Farfe le quatre Mars de la mesme année. Il revint à Rome après que la revolte cut esté appaisée ; mais la paix & la tranquillité n'y durerent pas long-tems. Le Pape fatigué par les feditions des Romains, vint en France l'an 1148. & fut reçu à Paris, par le Roi Louis VII. dit le jeune & l'Evefque Thibaut auparavant Prieur de saint Martin des Champs. Ils allerent au-devant de ce Pontife, & l'emmenerenten grande solemnité à l'Eglise de Nostre-Dame. Quelques jours après, Eugene voulut aller dire la Messe à sainte Genevieve à cause que cette Egliseestoit immediatement soumise au saint Siege. Quand il y fut arrivé, les Officiers de l'Eglise érendirent devant l'Autel un tapis de soïe , où il fe profterna pour faire fon Oraison. Ensuite il entra dans la Sacristie & se revestit pour la Messe. Cependant les Officiers du Pape prirent le tapis prétendant qu'il leur appartenoit selon la coutume ; les Chanoines au contraire pretendirent qu'il devoit rester à leur Eglise, & prirent querelle avec eux. Des paroles ils en vinrent aux mains : les Officiers du Pape furent si maltraités par les Chanoines, qu'il y en eur plusieurs de blessés, & le Roi mesme pensa l’estre aussi voulant appaiser le deforde. Le Pape & le Roi, pour punir ces Chanoines de leur insolence, refolurent de mettre des Benedictins en leur place & de leur oster cette Eglise. Néanmoins comme il y avoit parmi eux des personnes distinguées par leur Noblesse & leur science , on ne voulut pas d'ac börd les priver de leurs Prebendes ; mais seulement leir en laisser le revenu pendant leur vie, pour estre réüni après leur mort à la mense Conventuelle. L'Abbé de sains Victor & fes у NES Regu. Princes pour GATION DE ? SS. pag 626, CHANOI- Religieux en aiant eu ayis firent tant d'instances auprès de ces pour leur accorder cette Eglise , alleguant pour raiCONGRECongre- fons que les Chanoines Seculiers s'accoutumeroient mieux à leur maniere de vivre qu'à celle des Benedictins , qu'ils obrinrent leur demande. On tira de l'Abbaie de saint Victor douze Chanoines , qui furent conduits à sainte Genevieve, & l'un d'eux nommé Odon en fut élu premier Abbé. Ainsi d'un Chapitre Seculier , cette Eglife fuc erigée en Abbaïe l'an 1148. C'est ainsi que l'Histoire de ce differend est rapporté dans Apud Bol- la vie de faint Guillaume , qui aïanc esté du nombre des Anland, Tom. ciens Chanoines Seculiers , fe joignit aux Reguliers , & fut 1. April.act. dans la fuite Abbé de Roschildein en Dannemarc ; néanmoins Suger Abbé de saint Denis , qui avoit eu commission du Pape de faire ce changement en cette Eglise, rendant compte à ce Pontife de ce qu'il avoit fait , dit que ce fut pour le bien de la paix qu'il n'y mit pas des Benedičtins comme fa Sainteté l'avoit ordonné, & que ce fut à la priere des Chanoines Seculiers qu'il y mit des Religieux de saint Victor. Ils y vêcurent conformément à leur état jusqu'aux guerres des Anglois ; mais les desordres qu'elles causerent donnerent occasion au relâchement , qui s'introduisit encore en cette Maison aussi bien que dans plusieurs autres , comme nous avons dit ailleurs ; & il s'augmenta de relle forte , que sous le ; Regne de François Premier , le Parlement fut obligé de donner Commission à Pierre Brulard Conseiller pour informer des desordres qui y estoient. Mais bien loin que cela servist à retablir le bon ordre , le relâchement alla jusqu'à un tel point, que quelques années après Christophle de Thou Premier President, & Charles de Dormans Conseiller, s'y transporterenc pour tâcher d'y retablir la paix. Leurs bonnes intentions ne furent point secondées , au contraire le desordre augmenta dans la suite par une circonstance qui ne devoit pas naturellement produire cet effet. Joseph Foulon qui gouvernoit cette Abbaïe depuis l'an 1557. voulant empêcher qu'elle ne tombalt en Cominende , cruc que le meilleur expedient estoit de resigner son titre à quelque personne de qualité qu'il pust faire agréer au Roi, & à les Religieux par la consideration de la naissance. Pour cet effet il jetta les yeux sur Benjamin de Brichanteau fils du Marquis de Nangis |