Basle, qui durerent quelques années, & qui lui donnerent d'au- CHANOItres occupations. NES RFGU- ITALIE. Une autre sedition des Romains, qui sollicités par le Duc LATRAN EN de Milan, vouloient se saisir de sa personne, l'obligea de fonger plutost à sa fureté qu'à la reforme de l'Eglise de Latran. Il eut mesme de la peine à gagner l'embouchure du Tibre pour s'embarquer à Ostie sur une Galere, d'où il vint premierement à Pife, & ensuite à Florence, où il fut honorablement reçu, lorfque les Romains pilloient ses biens, & emprisonnoient fon neveu le Cardinal Gondelmaire. Enfin l'an 1442. après qu'il eut heureusement terminé le Concile de Florence, où affifterent Jean Paleologue Empereur de Constantinople, fon frere Demetrius & le Patriarche de la mesme Ville, avec plusieurs Evesques Grecs, qui se réünirent à l'Eglife Romaine, auffi-bien que les Armeniens & plusieurs autres Schifmatiques; estant encore à Florence, il ordonna aux Chanoines Frisonaires, qui tenoient pour lors leur Chapitre General à Ferrare, d'envoïer à Rome trente-deux de leurs Religieux pour reformer l'Eglise de Latran. Ils n'en envoïerent que cinq qui logerent d'abord dans le Palais contigu à cette Eglife, & lorsqu'ils se disposoient à bâtir un Monaftere, ils tomberent tous malades; il y en eut mesme qui moururent, ce qui fit abandonner aux autres cette entreprise pour retourner dans les Couvents de leur Congregation. Le Pape cependant persistant dans son dessein, envoïa l'année suivante des Lettres adressées à leur Chapitre General, datées de Sienne où il estoit pour lors, par lesquelles il commandoit aux Superieurs d'envoïer à Rome trente Chanoines avec un Prieur. Ils obéïrent à cet ordre, & furent encore reçus dans le mesme Palais de Latran, jusqu'à ce que le Monaftere fust achevé. Mais les Chanoines Seculiers qui desservoient cette Eglife, & quin'estoient qu'au nombre de douze, profitant de l'absence du Pape & de la Fefte du S. Sacrement, auquel jour on fait une procession folemnelle, qui attire à Rome tous les païsans des environs, prirent avec eux une troupe de ces païfans,& quelques-uns des plus mal intentionnés d'entre le peuple attaquerent les Religieux dans le Palais de Latran, lorsqu'ils y pensoient le moins, & qu'ils rendoient graces à Dieu à l'issuë de leur dîner ; & aïant rompules portes, ils en contraignirent quelques-uns de se jetter en bas par les feneftres ; ils en prirent LIERS DE CHA NOI d'autres, à qui ils firent mille outrages, donnerent tous leurs NIS REGU- meubles à cette canaille pour les emporter, & il y en auroit eu LATRAN EN mesme quelques-uns de tués, sans les Conservateurs du Peuple Romain, qui eftant accourus à leur fecours, les tirerent de leurs mains & les conduisirent au Vatican, où ils resterent jusqu'à ce que le tumulte fust appaisé,& qu'ils pussent en fureté retourner dans leurs Couvents. ITALIE. Cette nouvelle aïant esté portée au Pape qui estoit encore à Sienne, il en fut fort irrité. Il attendit à son retour pour punir les coupables, il avança mesme son voïage pour ce sujet; & eftant arrivé à Rome fur la fin du mois de Septembre 1443. il ordonna pour la troifiéme fois à ces Religieux de renvoïer à Rome trente Chanoines avec un Prieur. Ils furent fâchés de cet ordre, ils s'imaginoient que le Pape, après tant de difficul tés, se desisteroit peut-eftre de fon deffein: Neanmoins pour obéir à Sa Sainteté, l'année suivante dans leur Chapitre General qu'ils avoient accoûtumé de tenir tous les ans, ils compoferent une famille de trente Religieux qu'ils deftinerent pour S. Jean de Latran, ausquels ils donnerent pour Prieur D. Nicolas de Boulogne, & qui devoient se mettre en chemin au premier ordre qu'ils recevroient du Pape, auquel cependant ils envoïerent le Prieur seulement avec deux Religieux, pour lui faire d'humbles remontrances sur l'impuissance où ils eftoient de pouvoir surmonter toutes les difficultés qui se rencontreroient dans l'execution du dessein qu'il avoit pris, & dont ils le fupplioient de vouloir bien se defifter. Le Pape reçut tres-mal ces remonstrances, & fut plus d'un mois sans les vouloir admettre à fon Audience. Cependant aïant esté flechi par le moïen de leurs amis qui avoient parlé en leur faveur, il les fit venir & leur témoigna beaucoup de tendresse, lorsqu'il apprit que la famille de Latran avoit esté designée dans leur Chapitre, & qu'il n'y avoit que le danger où ils avoient esté exposés l'année precedente, qui les aïant intimidés, les avoient empefché de venir. Dans cet interval les Chanoines Seculiers tâchoient fous main de foulever le Peuple, en lui faisant accroire que ce Pontife vouloit chaffer les Romains de faint Jean de Latran, pour introduire en leur place des Etrangers, qui n'avoient au tre deffein que d'emporter les testes des saints Apoftres qu'on conserve dans cette Eglife. Le Pape en aïant eu connoiffance, NES REGU- les fit venir en sa prefence, emploïa toutes les voïes de dou- CHANOI ceur pour pacifier ces esprits qui estoient fi fort animés contre les Chanoines Reguliers, & voïant que les caresses & les pro- LATRAN EN messes qu'il leur faisoit, étoient inutiles, il assembla les Car- ITALIE. dinaux dans un Consistoire, ausquels il proposa le dessein qu'il avoit de reformer l'Eglise de S. Jean de Latran, en y mettant des Chanoines Reguliers à la place des Seculiers, qui s'acquittoient mal de leur devoir. Il y en eut quelques-uns qui ne furent pas de cetavis; mais la plus grande partie approuva le zele du Pape, & confentit qu'il nommast deux Cardinaux pour faire la visite de cette Eglife, qui furent Thomas Evefque de Boulogne, qui luifucceda sous le nom de Nicolas V.& Pierre Barbo Venitien, qui fucceda à Pie II. fous le nom de Paul II. Ces Cardinaux aïant trouvé parmi ces Chanoines Seculiers plus de defordre qu'on ne s'estoit imaginé, les crurent tout-à fait indignes d'occuper cette Eglise qui est la mere de toutes les autres; & ces Chanoines ne pouvant rien avancer pour leur justification lorsqu'ils furent en prefence du Pape, ils se demirent volontairement entre ses mains de tous leurs benefices. Sa Sainteté fit en mefme tems expedier une Bulle, par laquelle elle accordoit aux Chanoines Reguliers la Bafilique de faint Jean de Latran, avec tous les Canonicats, les Benefices, les Chapelles, les biens & les droits temporels & fpirituels qui en dependoient. Il créa par la mesme Bulle qui eft du mois de Jan-vier 1445.tous les Chanoines de la Congregation Frigdionienne ou de fainte Marie de Frifonaire, Chanoines de S. Sauveur de Latran, voulant que dans la suite ils en prissent le nom. L'année suivante il leur en accorda une autre, par laquelle, en leur confirmant le titre de Chanoines de S. Sauveur de Latran il les declaroit originaires de cette Eglife, en consequence de leurs anciens titres & privileges qu'il avoit fait examiner. Les Chanoines Reguliers ne furent pas long--tems paisibles possesseurs de cette Eglife; car deux ans après le Pape Eugene estant decedé, les Chanoines Seculiers voulant profiter de la vacance du S. Siege, se liguerent ensemble potir les en chaffer. Les Cardinaux qui craignoient les suites que pouvoit avoir cette affaire pendant le Conclave, les appaiserent en leur promettant qu'ils y feroient restablis immediatement après qu'ils auroient donné un Chef à l'Eglife. Ce fut Nicolas Vefur qui tomba l'élection l'an 1447. qui à la follicitation des Cardi CHANOI naux, les remit en possession de cette Eglise conjointement avec HIER les Reguliers ; à condition neanmoins qu'ils ne se mefleroient LATRAN EN point dans les affaires de ceux-cy, & n'affisteroient point au ITALIE. DE Choœur avec eux; mais il estoit impossible que des esprits qui estoient fi fort aigris les uns contre les autres, pussent vivre long-tems en bonne intelligence & dans une parfaite union. Les differens qu'ils avoient toujours ensemble, obligerent ce Tape à donner d'autres Benefices aux Chanoines Seculiers, il y en eut mesme quelques-uns qui furent faits Evesques, & il n'en resta qu'un avec quatre Beneficiers pour la garde des reli ques, ausquels on affigna un revenu annuel. *Les choses ne demeurerent pas long-tems en cet estat; car Nicolas V. estant mort en 1455. & Alphonse Borgia Espagnol de Nation, lui aïant succedé sous le nom de Calixte III. comme'il estoit estranger, il voulut d'abord s'attirer l'amitié des Romains, en renvoïant les Chanoines Reguliers dans leurs Monafteres, il restablit les Chanoines Seculiers, & cassa tout ce qu'Eugene IV. avoit fait. Il sembloit après tant de revolutions qui estoient arrivées à ces Chanoines Reguliers, qu'ils ne devoient plus penser à rentrer dans la possession de cette Eglife: neanmoins l'an 1464. leurs efperances se renouvellerent, lorsqu'ils virent quaprès la mort de Pie II. qui avoit fuccedé à Calixte III. les Cardinaux avoient choisi Pierre Barbo pour Souverain Pontife, qui prit le nom de Paul II. En effet, comme il avoit esté l'un des Commissaires nommés par Eugene IV. pour faire la Visite de l'Eglife de Latran, & qu'il avoit esté témoin de la negligence des Chanoines Seculiers pour le Service Divin, il rendit au commencement de son Pontificat cette Eglise aux Chanoines Reguliers, ordonnant à leur General d'envoïer trente Religieux à Rome, qui y estant arrivés, & croïant apparemment qu'ils ne devoient plus fortir de l'Eglise de Latran, voulurent que tout Rome fult temoin de leur prise de poffeflion; car ils y furent en proceffion, accompagnés des principaux Officiers du Pape, & fuivis d'une grande foule de Peuple, qui fut auffi témoin de leur fortie sept ans après, lorsqu'ils y furent contraints par la violence des Chanoines Seculiers, qui l'an 1471. immediatement après le decès de Paul II. estant entrés par force dans leur Monaftere avec un grand nombre de gens armés, les en chafferent pour la derniere fois, pillerent tou |