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dans cet Ordre, & qui ne font en usage que dans les Ordres ORDRE DU Militaires, prouvent assez qu'on le reconnoissoit comme une DE MONT Milice; mais cette Milice avoit esté supprimée par Pie II. l'an PELLIER. 1459. & l'Ordre estoit devenu purement Regulier, comme il paroist par les termes de la Bulle de Sixte IV. de l'an 1476. que nous avons ci-devant rapportés, & par la Regle de cet Ordre imprimée en 1564. par ordre du General Bernardin Cyrilli, qui en l'adressant à tous les Freres de l'Ordre, fait affez connoiftre qu'ils font tous veritablement Religieux, par ces paroles: Sponte nos ipfos obtulimus & fančto Dei Spiritui, Beata Virgini, & Dominis infirmis, ut perpetui essemus eorum fervi, caftitatem, paupertatem, obedientiam & humilem patientiam, actu libero nemine cogente, jurejurando, folemni voto, fumus polliciti. Il est néanmoins parlé dans cette Regle de Religieux Lays, c'est-à-dire de personnes veritablement Religieuses, & qui ne font pas destinées aux fonctions Ecclesiastiques : le terme de Lay eftant en usage dans presque tous les Ordres pour designer ces fortes de personnes, & mesme ils peuvent estre Commandeurs dans celui du Saint-Esprit; car il est dit que lorsque le Commandeur sera Lay,il ne pourra pas faire la correction à un Clerc; mais qu'elle appartiendra aux Cardinaux qui feront nommés pour cet effet par le Pape: Correctio verò Clericorum & specialium aliorum, ad Praceptorem Laicum non Reg. pertineat, fed ad Cardinales quibus à Domino Papa ipsa domus fuerit commendata. Que fi dans le commencement du dixseptiéme fiécle les Souverains Pontifes ont rendu à la Maison de Montpellier le Generalat qu'on lui avoit osté, ils n'ont pas prétendu que ces Generaux retablissent la Milice de cet Ordre en créant des Chevaliers purement Laiques & mesme engagés dans le mariage. Ils ont toujours au contraire regarde cet Ordre comme Regulier, puisqu'ils ont obligé les Commandeurs de Montpellier, ausquels ils ont accordé des Bulles, de prendre l'habit Religieux de cet Ordre, & d'y faire Profession; & de tous les Commandeurs du Saint-Esprit de Montpellier, qui ont esté depuis l'an 1619. que la Terrade prit le premier la qualité de General de cet Ordre en France, ni lui, ni aucun autre n'ont executé en cela l'intention des Papes, qui ont mesme refusé des Bulles à quelques-uns: ainsi tout ce que ces Commandeurs ont fait en qualité de Generaux estoit nul, n'estant pas revestus de pouvoirs legitimes, & aïant mesme esté

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ORDRE DU contre la volonté des Papes, en retablissant la Milice qui avoir DE MONT- esté supprimée par Pie II. C'est pourquoi quoiqu'il y eust en

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1700. des Chevaliers Laiques & des Prestres Religieux,ce n'eftoit point fon veritable estat, & le dernier auquel on devoit avoir égard. Il avoit toujours esté purement Religieux depuis la fuppreffion de la Milice, c'estoit là son dernier estat & auquelle Roi eut égard: ultimus status attenditur.

Les Prestres de cet Ordre sont qualifiés Chanoines Reguliers dans plusieurs Bulles des Souverains Pontifes. Le Saunier pretend que ce fut le Pape Eugene IV. qui les soumit à la Regle de faint Augustin outre celle de Gui leur Fondateur. Le Cardinal Pierre Barbo neveu de ce Pape, fut le premier qui n'estant point del'Ordre, fut fait Commandeur ou Precepteur de l'Hospital du Saint-Esprit de Rome & en cette qualité General de tout l'Ordre, ce qui a continué jusqu'à present que les Commandeurs de cet Hospital ont esté des personnes diftinguées par leur naissance, à qui les Papes ont accordé cette dignité pour recompenser leur merite. L'Ordre de saint Benoist en a fourni un, celui de saint Augustin un, celui des Servites aussi un, celui du Mont-Olivet deux, & celui des Chartreux un. Il y en a eu jusqu'à present environ soixante & dix, depuis le Comte Gui de Montpellier Fondateur de l'Ordre, parmi lesquels il y a eu un Pape, sept ou huit Cardinaux, deux Archevesques & douze Evesques. Alexandre Neroni, qui estoit Commandeur General en 1515. fut le premier à qui le Pape accorda l'habit violet avec la mozette & le mantelet à la maniere des Prelats de Rome, ce qu'ils ont toujours porté, à moins qu'ils n'aïent esté tirés de quelques autres Ordres, auquel cas ils retiennent aufsi, comme les Prelats Religieux, la couleur de l'habit de l'Ordre dont ils sont fortis. Ces Commandeurs ne font ordinairement Profession de cetOrdre qu'au bout de l'an, à moins qu'ils ne different àla faire pour quelques raisons, ou que les Papes ne les en dispensent. Ils portent néanmoins fur leurs habits la Croix de l'Ordre. Le Prieur de la Maison & Hospital du Saint-Esprit de Rome, tient la seconde place dans l'Ordre, & en est Vicaire General.

Les Religieux de cet Ordre sont habillés comme les Ecclesiastiques, ils portent seulement une Croix de toile blanche à douze pointes sur le costé gauche de leur Soutane & de leur

manteau,

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manteau, & lors qu'ils font au Chœur, ils ont l'esté un Sur- ORDRE DU plis avec une Aumuce de drap noir doublée de drap bleu, & DE MONTfur le bleu une croix de l'Ordre. L'hiver ils ont un grand PELLIER. Camail avec la Chappe noire doublée d'une étoffe bleuë, & les boutons du grand Camail sont aussi bleus. En France ils mettent toujours l'Aumuce sur le bras, cette Aumuce est de drap noir doublée & bordée d'une fourrure noire : en Italie ils la portent quelquefois sur les épaules, & en Pologne ils ne se fervent point d'Aumuce; mais ils mettent sur leurs Surplis une espece de mozette de couleur violette, qui n'a point de capuce & n'est point ronde comme les autres, mais descend en pointe par derriere. Les Commandeurs ont à la boutonniere de leur Soutane une Croix d'or emaillée de blanc, & au Chœur une Aumuce de moire violette, si c'est l'esté, ou un Camail de mesme couleur l'hiver.

Il n'y a que les Religieuses de Rome, quigardent la Clôture; la pluspart demeurent dans les mesmes Hospitaux que les Religieux, comme à Besançon & en d'autres endroits. Elles font aussi quelquefois seules dans d'autres Maisons, comme à Bar-fur-Aube, Neuf-Chasteau & autres lieux. Elles disent le grand Office selon l'usage de l'Eglise Romaine. La pluspart ont au Chœur un grand manteau noir, où il y a une Croix blanche auffi-bien que fur leur robe avec un voile noir ou espece de Cappe, & dans la Maison elles ont un voile blanc. Celles de Bar-fur-Aube ont dans les Ceremonies & au Chœur un voile noir d'étamine, sur lequel il y a aussi la Croix de l'Ordre. Il y a des Maisons de cet Ordre à Rome, à Tivoli, Formelli, Tolentin, Viterbe, Ancone, Eugubio, Florence, Ferrare, Alexandrie, Nurcie, & plusieurs autres Villes d'Italie, Les principales de France sont à Montpellier, à Dijon, Besançon, Poligny, Bar-fur-Aube, & Stephanfeld en Alface. Il n'y en a que trois en Pologne, dont la principale est à Cracovie, qui fut fondée d'abord à Pradnik, par Yves Evef- Duglosz, que de Cracovie, l'an 1221. mais comme cette Maison, qui estoit Hift Polon aussi un Hospital, ne pouvoit estre souvent visitée des perfon- 626. nes pieuses, que la compassion pouvoit porter à foulager les pauvres, à cause qu'elle estoit trop éloignée de Cracovie, il la transfera dans cette Ville l'an 1244. Il y a aussi un Monastere de Religieuses à costé de cet Hospital, & il s'en trouve quel ques-unes en Allemagne, en Espagne & mesme dans les In

lib. 6. pag.

Tome II..

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ORDRE DU des. Quoique la ville de Memmingen en Suabe ait reçu la DE MONT- Confeffion d'Ausbourg, & que la plus grande partie de ses Habitans soient Heretiques, il y a néanmoins un Hospital de l'Ordre du Saint-Esprit où les Religieux ont une Eglise ouverte; & ils portent publiquement le Saint-Sacrement aux ma-lades, mesme dans les maisons des Heretiques, où il y a des Catholiques. L'administration des biens de cet Hospital est entre les mains des Magistrats de la Ville, & les Religieux ont seulement soin des malades. Cet Hospital fournit à l'entretien de celui de Wimpffen du mesme Ordre qui est aussi dans la Suabe, & au milieu de l'herefie.

Cette Croix à douze pointes, que ces Chanoines Hospitaliers portent fur leurs habits, n'est qu'une nouveauté; ils la portoient anciennement toute simple à peu près comme la Croix de Lorraine, & comme la portent les Religieux Hospitaliersde l'Hostel-Dieu de Coustance, qui, à cause de cette Croix, qui est aussi de toile blanche, & que cet Hostel-Dieu est dedié au Saint-Esprit, ont fait des tentatives pour estre incorporés dans l'Ordre du Saint-Esprit de Montpellier; & par ce moïen se soustraire de la jurifdiction de l'Evesque de Couftance auquel ils sont soumis; mais il y a eu plusieurs Arrests du Confeil du Roi & du Parlement de Normandie, qui leur ont fait défense de prendre la qualité de Chanoines Reguliers de l'Ordre du Saint-Efprit, & de porter des Aumuces. Ces Hospitaliers de Coustance furent institués sous le titre de Clercs Reguliers de l'Ordre de saint-Augustin par Hugues de Morville Evefque de Coustance, l'an 1209. pour deffervir l'HostelDieu de cette Ville, & ce Prelat leur donna l'an 1214. des Reglemens qui ont toujours esté observés jusqu'à present; ces Religieux font toujours au nombre de douze, dont il y en a fix qui demeurent dans l'Hospital, les autres desservent des Cures qui en dépendent. L'Ordre du S. Esprit a pour armes de fable à une Croix d'argent à douze pointes, & en chef un Saint-Esprit d'argent en champ d'or dans une nuée d'azur.

Pierre le Saunier, de Cap. Ord. S. Spirit. Differt. Barbofa, de Fur. Ecclef. cap. 41. num. 113. Tambur. de Fur. Abbat. Tom. 2. difp.24. num.35. la Terrade, Discours fur l'Ordre du S. Esprit. De Blegny, Projet de l'Histoire des Religions Militaires. Silveft. Marul.Mar.Ocean di tut. gl. Relig. Pietr. Crefcenze, Prefid. Rom. Bernard Giuft. Chron.de gl.Ord.Milit. Hermant, Hift.des Ord.de Chevalerie, & plusieurs Factums & Memoires concernant cet Ordre.

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CHAPITRE XXXII.

CHANOI-
NES REGU-
LIERS ASSO-
CIEZ DE

L'ORDRE
DU S. ES-

Des Chanoines Reguliers afssociez de l'Ordre du Saint-Esprit. PRIS

TOICI

V

ICI encore des Chanoines Reguliers sous le nom d'Associez de l'Ordre du Saint - Esprit; mais on ne sçait, ni l'année, ni le lieu de leur établissement, ni ce qu'ils font devenus. Il y a néanmoins bien de l'apparence qu'ils ont subsisté; puisque l'on trouve plusieurs Editions de leurs Constitutions, dont il y en a deux à la Bibliotheque du Roi, l'une de Paris in 12. de l'année 1588. & l'autre auffi de Paris, in 4. de l'année 1630. Ces Constitutions furent approuvées par l'Archevesque de Roüen, les Evesques de Bayeux & de Coustance, & par plusieurs Docteurs, comme il paroist par l'Epistre Dedicatoire de ces Conftitutions.

C'est dans cette Epistre Dedicatoire adressée le 4. Novembre 1988. au Pape Sixte V. que le Fondateur de ces Chanoines se fait connoistre. Il se nommoit Jean Herbet & estoit Lorrain; il dit au Pape que sa mere estant enceinte de lui, le consacra à Dieu: que dans sa jeunesse Dieu lui inspira un grand zele pour son service, & qu'il eut toujours beaucoup d'averfion pour tout ce qui estoit contraire à ses Commandemens & à ceux de l'Eglife: que depuis vingt-fix ans ou environ, il avoit fait ferment de s'opposer fortement jusqu'à la mort aux Heretiques, aux méchans Catholiques, aux Ecclefiaftiques impudiques, yvrognes, avares, & qui negligeoient le Service Divin: que depuis vingt-deux ans, il avoit tous les jours ce lebré la sainte Messe, excepté seulement trois jours qu'il en avoit esté empesché par des personnes qui s'opposoient à fon Institut, & qu'il aimoit mieux mourir que d'estre privé pendant un seul jour d'offrir le Sacrifice adorable de nos Autels : qu'enfin il avoit esté inspiré de Dieu d'instituer sa Congregation, qui est divisée en une Confraternité, & en un Ordre de Chanoines du S. Esprit, que la Confraternité est pour tous les Catholiques de l'un & de l'autre Sexe: qu'elle estoit déja fort étenduë en Normandie, principalement dans le Diocese de Coustance, & que les Statuts en avoient esté approuvés par le Cardinal de Bourbon Archevesque de Roüen, par les Evefques de Coustance & de Bayeux & par plusieurs Docteurs en

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