Page images
PDF
EPUB

1

S. ESPRIT

lever & d'entretenir à leurs depens un Regiment pour agir ORDRE D contre les ennemis de l'Etat ; & les Religieux Profez qui ef- DE MONTtoient en poffeffion de plufieurs Maifons Conventuelles dans le PELLIER. Roïaume où ils n'avoient point discontinué de recevoir les enfans expofés, pretendirent que l'état de leur establiffement fuffifoit pour détruire ce qui avoit efté fuppofé pour l'obtention de cet Edit, alleguant au furplus qu'ils n'avoient jamais dependu de l'Hôpital de Montpellier; mais qu'ils avoient efté toûjours foumis à la jurisdiction du Precepteur de celui dé Rome, & quainfi le Roi n'avoit pas eu deffein de donner atteinte à leurs droits, fa Majefté n'aïant prononcé par fon Edit que la fuppreffion d'un Ordre qu'elle avoit cru éteint de fait & qui eftoit fous le titre de Montpellier.

Ils furent favorablement écoutés. Le Roi leur donna des Commiffaires en 1691. pour l'examen de fon Edit, & accepta en 1692. le Regiment offert par les Chevaliers. M. du Boulay Vicaire General de cet Ordre au fpirituel, & M. Grandvoynet Commandeur de la Maison Conventuelle de Stephanfeld en Alface, furent deputés pour folliciter conjointement le retabliffement de cet Ordre ; le premier par le Clergé Seculier, le fecond par les Religieux Profez, & Monfieur de Blegny Commandeur & Administrateur General, par les Chevaliers. Leurs follicitations eurent un heureux fuccès, car le Roi en 1693. revoqua fon Edit de 1672. retablit cet Ordre, lui rendit tous les biens qui avoient efté unis à celui de faint Lazare & nomma pour Grand Maiftre M. l'Abbé de Luxembourg, Pierre-Henry-Thibault de Montmorency Abbé Commen dataire des Ábbaïes d'Orcamp & de faint Mihel.

[ocr errors]

Il fembloit qu'après cela les Chevaliers ne devoient plus craindre qu'on les inquietât touchant leur establissement : déja leur nombre groffiffoit tous les jours: des perfonnes qui n'avoient aucun droit legitime, fous pretexte des titres de Vicaire General, de Chancelier, de Vice Chancelier & mefme de Vi-' caire Generaliffime qu'ils s'attribuoient, creoient de nouveaux Chevaliers. Ils eftoient divifés en plufieurs bandes. Il y en avoit qui prenoient le titre d'Anciens Chevaliers, & qui ne regardoient les autres que comme des intrus dans l'Ordre.Parmi ces Chevaliers anciens il y en avoit qui fe difoient premiers Ofciers d'epée. On y voïoit des Chevaliers de grace, des Chevaliers d'obedience, des Chevaliers fervans, & de petits Officiers.

ORDRE DU
S. ESPRIT

PELLIER.

tinrent que

Dès le quinze Fevrier 1692. ils avoient tenu un Chapitre DE MONT- aux grands Auguftins à Paris, où entr'autres chofes ils avoient deliberé qu'on ne recevroit aucuns Chevaliers qu'ils ne paiasfent chacun à l'Ordre pour le moins la fomme de fix cens livres, les Chevaliers de grace celle de douze cens livres, les Chevaliers d'obedience, fervans & autres petits Officiers quatre cens livres. Mais les Religieux rompirent toutes leurs mefures; car à peine le Roi eut-il prononcé le retablissement de l'Ordre en 1693. qu'ils reclamerent la Maison Magiftrale de Montpellier qu'ils avoient auparavant defavouée. Ils foul'Ordre du faint Efprit eftoit purement Regulier, & que la Milice eftoit une nouveauté du fiécle qui ne s'eftoit ingerée que par ufurpation dans l'administration des biens de l'Ordre. C'eft pourquoi le Roi nomma encore des Commiffaires pour l'execution de fon dernier Edit. Les Chevaliers ne manquerent pas de faire valoir leur antiquité pretendue qu'ils faifoient remonter jufqu'au tems de fainte Marthe, & de rapporter le pretendu Chapitre General tenu à Montpellier l'an 1032. Le Roi le dix Mai 1700. decida en faveur des Religieux. L'Ordre du faint Efprit fut declaré purement Regulier & Hofpitalier par un Arreft du Confeil d'Etat; & Sa Majefté fit defenfe à tous ceux qui avoient pris des qualités de Superieurs, Officiers & Chevaliers du preten du Ordre Militaire du faint Efprit de Montpellier, de prendre à l'avenir ces qualités, ni de porter aucune marque de cette pretendue Chevalerie, & de donner des Lettres ou provifions de Commandeurs, Chevaliers ou Officiers de cet Ordre. Sa Majefté ordonna de plus que le Brevet de GrandMaiftre, accordé à M. l'Abbé de Luxembourg feroit rapporté comme nul & de nul effet, & qu'il feroit furfis à faire droit fur les demandes des Religieux pour eftre remis en poffeffion des Maifons de cet Ordre & des biens qui avoient esté unis à celui de faint Lazare, jufqu'à ce que Sa Majesté euft pourveu au retabliffement de cet Ordre & de la Grande Maiftrife Reguliere du faint Efprit de Montpellier.

Après la mort de M. l'Abbé de Luxembourg, qui conformément à cet Arreft du Confeil d'Etat, avoit remis entre les mains du Roi fon Brevet de Grand-Maitre de l'Ordre du Saint Efprit de Montpellier, on fit de nouvelles tentatives auprès du Roi pour le rétablissement de cet Ordre, & ta Majefté par un

S. ESPRIT

Arreft du Confeil d'Etat du 16. Janvier 1701. nomma Mon- ORDRE BU feigneur le Cardinal de Noailles Archevelque de Paris, M. DE MONTBoffuet Evefque de Meaux, le Reverend Pere de la Chaife, PELLIER. Meffieurs l'Abbé Bignon, de Pommereu, de la Reynie, de Marillac & d'Agueffeau pour examiner les Bulles, Lettres Patentes, Declarations, Arrefts & autres Titres concernant cet Ordre; & voir fur leurs avis, s'il convenoit, & s'il eftoit poffible de rétablir la Commanderie Generale du Saint-Elprit de Montpellier & fes dépendances, & quelles précautions l'on pourroit prendre en ce cas pour le Reglement tant du spiri tuel que du temporel de cet Ordre, ou s'il ne feroit pas plus à propos d'en emploier les biens & les revenus à quelqu'autre ufage pieux; & par deux autres Arrefts des vingt-quatre Novembre 1704. & premier Juin 1707. Sa Majesté nomma pour Rapporteur M. Laugeois d'Imbercourt, Maître des Requeftes.

En 1707. M. le Duc de Chatillon, Paul-Sigifmond de Montmorenci, aïant demandé au Roi la Grande-Maîtrise de cet Ordre, & Sa Majesté lui aïant permis d'en faire connoistre le veritable caractere & la Milice, il confulta plufieurs Docteurs de Sorbonne, neuf celebres Avocats & quelques autres perfonnes qui furent tous d'avis que l'Ordre dans fon Origine avoit efté Laique & Seculier, & que ce n'a efté que dans la fuite qu'il a efté Mixte, compofé de perfonnes Laiques pour l'administration du temporel, & de Clercs Reguliers pour l'administration spirituelle, & on ne trouvoit point d'inconvenient qu'un Laique fuft Grand-Maître de cet Ordre, à l'exemple de plufieurs Ordres Militaires, qui, quoique compofés de Chevaliers Laiques & de Religieux, ne laiffoient pas d'eftre gouvernés par des Grands-Mailtres Laiques.

fe

Les Religieux de l'Ordre du Saint-Efprit qui fembloient avoir interest que cette Milice ne se rétablist point, puisqu'il l'avoit difputée en 1693. & que ce ne fut que fur leurs remontrances que le Roi par fon Arreft du 10. Mai 1700. avoit declaré leur Ordre purement Regulier & nullement Militaire, joignirent néanmoins à M. le Duc de Chatillon, & dans une Requeste qu'ils presenterent au Roi, ils demanderent acte à Sa Majefté de ce qu'ils n'entendoient point fe prevaloir, ni se fervir de l'Arreft du 10. Mai 1700. au Chef qui avoit reputé l'Ordre du Saint-Efprit de Montpellier purement Regulier;

S. ESPRIT

PELLIER.

ORDRE DU mais feulement en ce qu'il avoit exclu de cet Ordre les préDE MONT- tendus Commandeurs, Officiers & Chevaliers qui paroiffoient pour lors fans caractere & fans titres legitimes, & dont la plufpart eftoient plus propres à le deshonorer qu'à le rétablir, & de ce qu'ils confentoient que cet Ordre fust, comme il avoit esté dans son Institution, compofé de Religieux de deux fortes de conditions,les uns Laiques pour l'adminiftration du temporel feulement, engagés à l'Ordre par les Voeux d'obéiffance & d'Hofpitalité à un Chef ou Grand-Maître de l'Ordre Laique, & les autres, Clercs, pour l'administration du fpirituel, engagés à l'Ordre par les Voeux de pauvreté, de chafteté, d'obéiffance, & du fervice des pauvres, & prioient auffi Sa Majesté de conferver les Commandeurs profez de cet Ordre dans l'exercice de la jurisdiction fpirituelle fur les Religieux Hofpitaliers & les Religieufes Hofpitalieres de l'Ordre; & qu'à cet effet le Grand-Maître feroit chargé par le Brevet de Sa Majefté, d'eftablir un Grand-Prieur d'Eglife & Vifiteur General qui ne pourroit eftre qu'un Preftre Religieux de l'Ordre, qui feroit confirmé par le Pape.

Il fembloit qu'après ce confentement des Religieux qui demandoient le rétablissement de la Milice & d'un GrandMaistre Laique, le Roi alloit revoquer fon Arreft du 10. Mai 1700. qui déclaroit l'Ordre purement Regulier, & qu'il alloit auffi reconnoistre la Milice de cet Ordre. Cependant par un autre Arrest du Confeil d'Etat du 4. Janvier 1708. Sa Majesté confirma celui du 10. Mai 1700. & ordonna qu'il feroit executé felon fa forme & teneur, & en confequence que l'Hofpitalité feroit rétablie & obfervée dans la Commanderie Generale, Grande-Maîtrife Reguliere de l'Ordre du Saint-Efprit de Montpellier, , par le Commandeur General, Grand-Maître Regulier, qui y feroit inceffamment establi. On ne fçauroit en ce jugement trop admirer la Juftice & l'équité du Roi, qui prononce & decide que l'Ordre eft Regulier; parce que c'eft le dernier eftat où l'on le trouve, & que c'eft un principe de l'un & l'autre droit, que dans ces matieres le dernier eftat décide; ultimus ftatus attenditur.

L'Ordre à la verité avoit efté dans fon origine Laïque & Seculier. Il eftoit devenu enfuite Mixte, c'eft-à-dire, compofé de Clercs ou Preftres Religieux, & de Laiques. Les termes de Commandeurs, de refponfion, & autres dont on fe fervoit

« PreviousContinue »