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ORIGINE

se rencontrent dans la conversation du monde. Quoique S. Augustin soit donc consideré comme le Pere & DES CHA

NOINIS

se premier Instituteur des Communautés Ecclesiastiques, il ne REGULIERS dressa pas neanmoins une Regle particuliere pour son Clergé, se Ibid. parz contentant de la Regle & de l'exemple des Apostres, qui avoient 4.1.1.0. enseigné la pratique de la vie commune & de la defapropria- 48. n. 9 tion parfaite: & comme dans la suite la plupart des Evesques firent vivre aussi leurs Clercs en commun dans l'observance exacte des Canons des Conciles; c'est ce qui fit qu'on leur donna le nom de Chanoines, que les Grecs donnoient aussi indifferemment aux Ecclesiastiques, aux Moines, aux Religieuses & aux Vierges consacrées à Dieu, comme remarque Balzamon fur le Canon VI. de la premiere Epistre canonique de S. Basile à S. Amphiloque; & par le nom de Chanoine ou de Chanoinesse, les Grecs designoient les personnes inscrites dans le Canon ou Catalogue de la Communauté.

Tom. 1. p. 54.

Ce nom de Chanoine estoit encore commun à tous les Of De Vert Explic. des ficiers de l'Eglife, mesme jusqu'aux plus bas; comme fon-Ceremonies neurs, fossoyeurs, & autres qui estoiemt emploïés dans la Ma-de l'Eglifo tricule ou Catalogue, in Canone, & entretenus aux depens de la Fabrique : c'est pourquoi on a aussi donné ce nom à des domestiques qui servoient & estoient nourris dans les Monafteres. Il y en a à la verité qui pretendent que le nom de Chanoine vient de Canon; & que ce mot signifie la mesure ou quantité de sa ration de bled, de vin & autres choses necef-faires à la vie, qu'on distribuoit par jour, par semaine, par mois ou par an à chaque Clerc pour sa subsistance: proprement sa paye, sa solde, sa prebende ou livrée, sa penfion, sa portion autrement exprimée par S. Cyprien,par le mot de spor- Cypr tula, le panier où les Clercs mettoient leurs vivres & leurs pro- epift. 36. visions. Livrée, du Latin liberata, c'estoit ce qu'on livroit à un 66. Clerc pour vivre & s'habiller, d'où on appelle encore livrée l'habit qu'un Maistre livre à ses domestiques, qu'on appelle gens de livrée.

Ce ne fut cependant que vers le douziéme fiécle que l'on Thomaf revêtit l'Ordre des Chanoines du nom & de la gloire de faint comme ciAuguftin, pour diftinguer ceux de ces derniers liécles d'avec dessus n. 3. ceux du tems de Loüis le Debonnaire, pour lesquels ce pieux Empereur qui emploïoit tous ses soins à regler & à reformer le Clergé & les Moines, fit composer parle Diacre Amalarius

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NOINES

ORIGINE une Regle qu'il fit approuver par le Concile d'Aix-la-Chapelle affemblé l'an 816. laquelle est à peu près la mesme que REGULIERS. celle qui avoit esté dressée par faint Chrodegand Evefque de Ibid. part. Mets, dont nous parlerons dans le Chapitre VIII. qui estoit 1.3 tirée des faints Canons, des ouvrages des Peres, & principa

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Ibid. part. 4. l. I. c.

48. 2. 1.

lement de la Regle de S. Benoift.

Mais comme dans la suite du tems, principalement dans l'Occident, les Chanoines s'estoient relâchés à un tel point, 4.49.n.3. qu'ils eftoient comme abîmés dant la saleté d'une incontinence universelle, & qu'ils acqueroient leurs benefices par un commerce infâme de symonie; S. Pierre Damien emporté par l'ardeur de fon zele, follicita fortement le Pape Nicolas II. pour remedier à ces defordres, & bannir entierement la proprieté d'entre les Chanoines, qui sembloit leur avoir esté permise par la Regle d'Aix-la-Chapelle, puisqu'elle ne les obligeoit point à renoncer à leur patrimoine. C'est pourquoi ce faint Pontife assembla à Rome un Concile de cent treize Evefques l'an 1059. où, après avoir condamné la symonie & le concubinage, il ordonna que les Clercs logeroient & vivroient ensemble, & mettroient en commun ce qu'ils recevroient de l'Eglife, les exhortant à la vie commune des Apoftres, c'està-dire à n'avoir rien en propre.

La mesme chose fut ordonnée dans un autre Concile par Alexandre II. l'an 1063. ainsi ces deux Conciles aïant imposé à tous les Clercs la desapropriation & la vie commune, il fallut pour l'autoriser remonter à l'Institution de S. Augustin, dont les Clercs vivoient en commun dans une pauvreté volontaire. L'on se servit pour cela de deux difcours de ce Saint, que S. Pierre Damien cite & qu'il nomme: de moribus Clericorum ; & comme il falloit opposer une Regle à une autre qui estoit celle d'Aix-la-Chapelle, l'on donna le nom de Regle à ces deux discours de saint Augustin. C'est neanmoins une difpute qui eft entre plusieurs Escrivains, qui n'ont jamais pû s'accorder ensemble touchant la veritable Regle de faint Auguftin, pour sçavoir si c'estoit ces deux Sermons, ou fon Epistre 109. adressée à des Religieuses. Quoiqu'il en soit, tous ceux qui suivent la Regle de faint Augustin, tant Religieux que Religieuses, ne reconnoissent point d'autre Regle que cette Epî

tre 109.

Les Reglemens que firent ces deux Conciles pour obliger les
Chanoines

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Chanoines à la desapropriation, ne furent pas reçus par tous ORIGINE ceux qui prenoient ce titre, le relâchement continuoit tou- NOINFS REjours parmi eux, c'est ce qui obligea quelques Chanoines de GULLERS. l'Eglise d'Avignon, de former dans le mesme siéclela Congregation de S. Ruf. Sur la fin dumefme fiécle Yves de Chartres reforma ceux de S. Quentin de Beauvais, & sa Reforme fut introduite dans plusieurs autres Eglifes; mais ils ne se difoient pas encore Chanoines Reguliers de l'Ordre de S. Augustin. Il y en avoit au contraire qui se disoient de l'Ordre de S. Silveftre Pape, & d'autres de celui de S. Urbain Pape & Martyr. Mais de sçavoir quelles estoient les Regles de ces deux Papes; c'est ce que l'on ignore. Il se peut faire que ces Chanoines qui se disoient de l'Ordre de S. Sylveftre & de faint Urbain, avoient pris ce nom à cause que leurs Eglises eftoient dediées en l'honneur de ces deux faints Pontifes, de mesme que quelques Auteurs de la Vie du B. Michel Gedroc Polonois, de l'Ordre des Chanoines Reguliers de la Penitence des Martyrs, disent qu'il entra dans l'Ordre de S. Marc, à cause que leur Monaftere de Cracovie, qui est le principal de ceux qu'ils ont en Pologne, porte le nom de S. Marc l'Evangelifte.

On pourroit dire neanmoins que dès le onziéme siécle, il y avoit des Chanoines Reguliers qui avoient pris la Regle de faint Augustin tirée de son Epistre 109. puisque Gervais Archevesque de Reims dans une Charte donnée en 1067. pour le retablissement de l'Abbaïe de saint Denys de Reims, dit : qu'il y avoit establi des Chanoines qui faisoient profession de la Regle & de l'Ordre de S. Augustin: Canonicos ibidem ad honorem & laudem Dei constitui, Beati Augustini Regulam Ordinemque profitentes. Cela se pourroit encore prouver par une Lettre que le Pape Urbain II. escrivit à la fin de ce fiécle à l'Abbé Roger de Soiffons, où il suppose qu'il y avoit des Chanoines qui suivoientla Regle de S. Augustin: mais le P. Cha- Chaponet ponel Chanoine Regulier de la Congregation de France, Chanoines avouë que ce Pape & cet Archevêque ont voulu seulement 1. 1. c. 10, parler du genre de vie conforme à celui des Clercs de faint Augustin, ou de quelques Constitutions particulieres, tirées des ouvrages de ce Pere; & qu'il est certain que ce ne fut que dans le douziéme fiécle que les Chanoines Reguliers commencerent à faire des vocux folemnels. Quelques Eglifes, ditil, commencerent dès l'an 1110. à prendre la Regle de sains

Tome II.

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GULIEKS.

ORIGINE Augustin tirée de son Epistre 109. elle se communiqua ensuite NOINIS RE- peu à peu à quelques maisons de l'Ordre, jusqu'à ce qu'Innocent II. dans le Concile de Latran l'an 1139. ordonna que tous les Chanoines Reguliers se soûmettroient à cette Regle; & ce fut alors qu'ils prirent tous le nom de Chanoines Reguliers de l'Ordre de S. Augustin..

Penot,

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2. c. 43.

L'on vit après cela l'Ordre Canonique dans un estat floriffant, l'observance qu'on y pratiquoit le mit en reputation.. Plusieurs Evesques retablirent la Regularité dans leurs Eglifes. Ceux qui fondoient des Monafteres y mirent des Chanoines Reguliers, & quelques-uns de ces Monafteres devinrent Chefs de celebres Congregations. Celles de S. Victor à Paris, de sainte Croix de Conimbre en Portugal, & plusieurs autres dont nous parlerons dans la suite, ne furent pas des moindres ornemens de cet Ordre, où le relâchement s'estant encore introduit dans la suite, a esté cause qu'il s'y est fait plusieurs reformes, dont la plus generale & qui regardoit tous les differens corps. de Chanoines Reguliers, fut faite l'an 1339. par le Pape Benoist XII. qui dressa à ce sujet des Constitutions qui contiennent foixante-quatre articles ou paragraphes, qu'il voulut estre observés universellement.

Il y en a qui pretendent que ces Constitutions furent abroHift. trip. gées par Clement VI. successeur de Benoist. Penot qui a fait Lib. Hiftoire des Chanoines Reguliers de Latran, dit avoir vû une copie des Lettres qui les annulent, & dont l'original est confervé dans le Monastere de Sainte Marie de Sarragoffe: cependant comme Boniface IX. a ordonné dans la suite la tenuë des Chapitres Provinciaux, conformement aux Conftitutions de Benoift XII. & que Martin V. dispensa les Chanoines Reguliers de Latran de l'observance de ces Conftitutions; il y a bien de l'apparence qu'elles ne furent point annulées, & qu'elles ont fubfifté long-tems après..

Themaff.

Les Chanoines Reguliers ont de tems en tems des diffe Difcipt. Ec- rents au sujet de la préseance qu'ils pretendent au dessus des clef. 4. part. Moines & des autres Reguliers, & que le P. Thomaffin leur 11.48. donne, comme faisant, dit-il, une partie du Clergé. Ils la pre

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tendent non seulement par rapport à l'antiquité, comme ajant eu, à ce qu'ils disent, les Apostres pour Fondateurs; mais encore en vertu d'une Bulle de Pie IV. qui accorda aux Chanoines Reguliers de la Congregation de Latran, la préseance

au dessus des Moines du Mont-Caffin. Mais il faut remarquer DORIGINE que sous le Pontificat de ce Pape, ces Chanoines aïant fait NOINES RE des tentatives pour rentrer dans la poffeffion de l'Eglife de GULIERS. S. Jean de Latran dont ils avoient efté chaffés plusieurs fois, comme nous le dirons dans les chapitres suivans, ils ne purent obtenir ce qu'ils souhaitoient, & le Pape les establit dans l'Eglife de Notre-Dame de la Paix à Rome, comme pour les consoler de ce qu'ils ne rentroient pas à S. Jean de Latran, & termina aussi en leur faveur le procès qu'ils avoient depuis près d'un fiécle avec les Moines Benedictins de la Congregation du Mont-Caffin, au sujet de cette préfeance qu'il accorda aux Chanoines Reguliers de Latran par une Bulle de l'an 1564. par laquelle il ordonna que dans les Proceffions & les actes publics, ils precederoient les Moines du Mont-Caffin, & que les Abbés de ces deux Congregations se trouvant fans leurs Religieux aux Conciles Provinciaux & Synodaux, & dansles actes publics & privés, où les Abbés ont droit de se trouver, ils prendroient le rang selon l'antiquité de leur promotion,& non selon l'antiquité de leur Congregation. Mais cette Bulle n'est qu'en faveur des Chanoines Reguliers de Latran seulement, & non pas des autres Congregations du mesine Ordre; ce qui est si vrai, que dans les Proceffions publiques qui font affez frequentes à Rome, les Chanoines Reguliers de S. Pierre aux Liens, qui sont de la Congregation de S. Sauveur de Bologne, font precedés par les Moines Benedictins du Mont-Caffin, Ies Camaldules, les Silveftrins, les Cifterciens, les Feüillans, les Moines de Vallombreuse, & ceux du Mont-Olivet.

Le P. Hugo Chanoine Premontré de l'ancienne Rigueur, dans fa response à la replique des PP. Benedictins de la Congregation de S. Vannes en Lorraine, au sujet du differend qui estoit entr'eux touchant la préseance, dit qu'il n'estoit pas inftruit de celles que les Moines d'Italie ont sur les Chanoines de faint Sauveur; mais qu'il sçait que cela est contraire au droit, si le fait est tel qu'on le debite. Je ne pretends point examiner s'il est contraire au droit ou non; mais je puis affurer le P. Hugo de la verité de ce fait pour en avoir esté temoin, comme ajant affifté pendant fix ans à ces Processions, & pendant les Conclaves d'Alexandre VIII. & d'Innocent XII. le Clergé Seculier & Regulier de Rome, eftant obligé d'aller auffi tous les jours en proceffion autant de tems que dure le

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