NES REGU S. JEAN veus de Benefices, ou les Cloistriers mesmes, lorsqu'ils font "CHANOLenvoiés par leurs Superieurs dans les Universités pour y étu- "LIERS DE dier, ou en Campagne pour se promener, peuvent quitter « tout-à-fait l'habit de Cloistre, & s'habiller tout de noir com- "GNES. me font les Seculiers. Nous ne voïons point non plus de Sta- « tut dans nostre Maison qui l'autorise, ni de decision d'aucun « Docteur qui l'approuve. Il est vrai que l'on garde dans le « Cartulaire de l'Abbaïe des Chanoines Reguliers de faint Bar- « thelemy de Noyon, un Privilege de Martin IV. qui vivoit en « 1296. par lequel, sur la requeste de l'Abbé & de sa Com- " munauté, il leur accorde la permiffion de porter l'habit noir « hors de la Maison, & mesme aux Beneficiers qui en dépen- « dent. Voici ce Privilege. Martinus Episcopus, fervus fervorum Dei, Dilectis filiis Abba- « ti & Canonicis Monafterii fancti Bartholomei propè Noviodunum “ Ordinis Sancti Augustini falutem, & Apoftolicam Benedictionem. « Sincera devotionis affectus, quem ad nos & Romanam geritis « Ecclefiam, promeretur ut petitionibus veftris, quantum cum Deo « poffumus, favorabiliter annuamus : Hinc eft quod nos vestris « fupplicationibus inclinati, ut Abbas & Religiofi Monafterii veftri, « etiam Parrochialium Ecclefiarum Rectores, qui ex dicti Ordinis « Institutis, vestem superiorem albam gestare confueverant, quoties ipfos protractandis, procurandis & peragendis Monafterii & « Parrochialium Ecclefiarum negotiis, aliisque rationabilibus & « honestis causis Monasterium prefatum exire contigerit, veste su- « periori nigri coloris, donecin prefatum Monasterium fint reverfi, « liberè & licitè uti valeant, Conftitutionibus, & Ordinationi- « bus Apoftolicis, nec non ftatutis & confuctudinibus Monasterii & « Ordinis predicti, caterisque contrariis nequaquam obftantibus, " authoritate Apoftolica tenore præfentium indulgemus. Datum Ge- “ nesiani Pranestinenfis Dioces. IV. Id. Augufti Pontificatûs noftri “ anno fecundo. : Erasme qui estoit Chanoine Regulier de l'Abbaïe de Sion & " qui n'ignoroit pas le Privilege acordé aux Chanoines Reguliers " de saint Barthelemy de Noyon, se fit néanmoins un fcrupule " de s'en servir. En effet, comme il estoit obligé d'estre sou- " vent à la Cour des Princes & parmi les personnes de diftine- " tion de son tems,qui cherchoient sa compagnie avec empresse- " ment, & que fon habit blanc l'incommodoit, il écrivit au Superieur de fon Monaftere, qui trouvoit mauvais de ce qu'il " Tome II. N NÉS RE- CHANOI- >> portoit un habit noir, & lui manda qu'il en avoit obtenu la >> permiffion de Jules II. qui la lui avoit accordée à condition » qu'il garderoit toujours dans ses habits quelque marque de VIGNFS. >> celui de sa Profeffion: Ut pro arbitrio quodcumque signum insti» tuti, vere gestarem. En effet il n'est pas permis à un Cha>> noine Regulier de cacher de telle maniere son habit qu'il ne > paroisse point du tout: c'est pour cette raison & dans cette » vûë, que nos Peres assemblés dans un Chapitre General au mois » de Juin de l'an 1623. parlant de l'habit que nous devons porter >> quand nous allons en campagne, ordonnent que nous aurons » des bas noirs ou bruns, une culotte, une veste noire, & par>> dessus un petit Rochet de toile avec une foutanelle noire par» dessus. Ce Statut & cette Ordonnance faite pendant que le » Siege Epifcopal de Soiffons estoit vacant par la mort de Mon» fieur Charles de Hacqueville, fut ensuite confirmé par Mon» fieur Simon le Gras fon Succeffeur en 1626. dans une visite " qu'il fit pour exercer les droits que les Evesques de Soiffons > ont fur notre Maison. On dira peut-estre qu'un Prestre ni » un Clerc ne doivent jamais quitter la foutane, & que quand » ils vont en campagne ils la doivent trouffer, mais jamais la » quitter دو Il est vrai que les Souverains Pontifes & les Conciles >> obligent tous les Clercs à porter toujours l'habit clerical; > mais il est aussi à remarquer que les Clercs doivent avoir trois >> fortes d'habits, l'un pour le Miniftere, l'autre pour l'ufage or>> dinaire, & le troisiéme pour la campagne. Celui-ci peut estre > porté plus court que les autres, selon que faint Charles Borro>> mée l'a decidé dans un de ses Conciles de Milan dont il estoit » Archevesque en 1568. où il est dit. ; Clericis iter habentibus, » quovis vestitu contractiori uti licebit & decentem tamen illum » atque hujusmodi esse opportet, ex quo vos effe Ecclefiaftici Or» dinis homines facile possint agnofci : cùm verò eo venerint quò " pervenire contendunt, talarem togam induant. Cette foutanelle est aussi approuvée par son Eminence M. » le Cardinal le Camus Evesque de Grenoble dans ses Statuts > Synodaux à la page 34. article 4. D'où l'on peut conclure "1o. que ce n'est que dans les voïages qu'il est permis de porter >> un habit court, & en second lieu que cette foutanelle ne doir » rien avoir que de modeste. Il est aisé de conclure de tout ce >> que nous venons de dire, que nous devons dans nos voïages NES RE nous tenir à l'Ordonnance de notre Chapitre de l'an 1623. CHANΟΙoù il est dit que nous aurons toujours un Rochet qui est GULIERS notre habit essentiel, avec une soutanelle noire pardessus. "JEAN DES Je suis, &c. Cette decision en faveur du Rochet seul que Monfieur de Louën regarde comme la seule marque essentielle de l'habit des Chanoines Reguliers n'a pas plû à tous ses Confreres ; car j'ai une Lettre d'un Chanoine de saint Jean des Vignes, qui aïant lû cette dissertation, marque qu'il n'approuve nullement cette decifion, & que la Soutane est encore l'habit essentiel des Chanoines Reguliers; en effet ils ne doivent pas se conformer aux Ecclesiastiques en toutes chofes, & fi ceux-ci portent des foutanelles, ce n'est pas une consequence que les Chanoines Reguliers en doivent porter, ou du moins en porter pardeflus le Rochet sans avoir encoreleur Soutane sous le mesme Rochet: c'est ce que pratiquent les Religieux de la Congregation de France, & les plus reformés d'entre les Chanoines Reguliers. Nous ajousterons encore que Monfieur de Louën s'est trompé lorsqu'il dit que la reforme que fit le Pape Benoist XII. ne regardoit que les Chanoines Reguliers de Latran, puisqu'il n'y avoit point de Congregation de Latran en 1339. & qu'elle n'a commencée que plus de cent ans après, ou plustost que celle de Sainte Marie de Frisonaire fut establie à saint Jean de Latran, dont elle prit pour lors le nom qui lui fut donné par Eugene I V. l'an 1445. Cette Reforme de Benoift XII. regardoit tout l'Ordre Canonique; puisque ce Pape ordonna à tous les Chanoines, en quelque lieu qu'ils fussent, de tenir des Chapitres Provinciaux tous les quatre ans. Voïez P. le Gris Chronic. abb. S. Joann. ad Vineas. Sammarth. Gall. Chriftian. DE S. VIGNES. REFORME CHAPITRE XIV. De la Reforme des Chanoines Reguliers en France, par le Bienheureux Yves Evesque de Chartres, avec un abregé de sa vie. UN des plus Illuftres Reformateurs de de l'Ordre Canonique de faint Quentin de Beauvais, & enfuite Evesque de Chartres. Il estoit fils d'un Gentilhomme de Beauvais nommé Hugues d'Autryvyle ou d'Auteüil, & de Hilemburge ou Hiltemberge, & nâquit avant le milieu du onziéme fiécle. Il fut élevé avec beaucoup de soin dans les fentimens de la pieté Chrétienne, & dans l'étude des Lettres humaines. Après avoir appris la Philofophie, il fut envoïé à l'Abbaïe du Bec en Normandie dans le Diocese de Roüen, pour faire sa Theologie sous le celebre Docteur Lanfranc qui en estoit Prieur, & qui fut depuis Abbé de faint Etienne de Caën, d'où il fortit pour monter sur le siege Archiepifcopal de Cantorbery en Angleterre. Il s'y rendit si habile, qu'il fut jugé capable de l'enseigner quelque tems après. Il s'appliqua profondement à la lecture des saints Canons & des Conciles, & recüeillit avec soin leurs maximes, leurs Decrets, & les Canons qui pouvoient servir à regler les mœurs & la difcipline. Ce furent ces lumieres & ces connoissances qui lui firent deplorer le relaschement où estoient tombés les Chanoines qui avoient abandonné la vie commune & qui eftoit fi rare & fi peu connuë (comme il le dit lui-même) qu'il sembloit qu'elle eust esté generalement profcrite de toute la terre. Il ne put diffimuler à l'Evesque de Beauvais la peine qu'il en avoit. Ce Prélat n'y fut pas insensible, il fit bâtir dans un des Fauxbourgs de Beauvais un Monastere pour y retirer des Chanoines qui y vecussent en commun & pussent rappeller l'ancienne difcipline dans toute leur conduite. Il en dédia l'Eglise l'an 1078. fous le nom du Martyr faint Quentin, parce qu'avant fon Episcopat il avoit esté Doïen & Cuftode de celle de faint Quentin en Vermandois, & il y establit Yves pour premier Abbé, & non pas Prevost comme quelques-uns ont écrit. D'YVES DE discip. Eccl. Son principal soin fut d'appliquer à la conduite de ses Cha- REFORME noines l'usage des saints Canons. Il fit de ce Monastere com- BEAUVAIS. me une Pepiniere, dont il tira un grand nombre de Chanoines, qu'ils envoïa à divers Evesques pour fonder d'autres semblables Colonies de la vie commune. Vincent de Beauvais, faint Antonin, Onuphre & plusieurs autres lui donnent la qualité de Restaurateur des Chanoines Reguliers de saint Augustin; mais le Pere Thomassin pretend qu'ils se sont Thomaff. trompés, qu'il n'en paroist aucun vestige dans ses Lettres, par 4 v.1. que la 286. qui se trouve dans les dernieres Editions, ne se chap.48. trouve pas dans les anciennes, & donne sujet de douter qu'elle est supposée. Il ajouste que Philippe Evefque de Troyes, voulant faire un établissement de Chanoines vivant en commun dans sa Ville Episcopale, fit venir Yves mesme avec quelques-uns de ses Chanoines, & qu'ils convinrent qu'ils dépendroient pour le temporel de la Cathedrale de Troyes, & pour les reglemens spirituels de saint Quentin de Beauvais. Cet Auteur pretend prouver par-là qu'ils n'eurent pas la Regle de faint Augustin; mais je ne trouve pas que ces preuves foient suffisantes; car il y a beaucoup de Congregations qui suivent la Regle de faint Augustin, & qui ont des Constitutions differentes qui fervent de reglemens à ces Congregations. Ainfi le Bienheureux Yves establissant des Chanoines vivant en commun, leur auroit pu donner la Regle de saint Augustin, & fait pour eux des reglemens particuliers, s'il estoit vrai que lorsque l'Evesque de Troyes demanda à Yves des Chanoines, on eust déja parlé de Chanoines Reguliers qui suivissent la Regle de faint A ugustin. Mais nous avons montré dans le Chapitre 11.que del'aveu mesme des Chanoines Reguliers qui font remonter leur antiquité le plus haut qu'ils peuvent, ce n'a esté que dans le douziéme fiécle qu'on a commencé à donner le nom de Chanoines Reguliers de l'Ordre de saint Augustin à ceux qui aïant renoncé à la desappropriation se soumirent à la Regle de ce faint Docteur de l'Eglife, & il se peut faire que le Bienheureux Yves de Chartres fut des premiers à faire recevoir cette Regle par ses Chanoines au commencement du douzieme fiécle. Quoiqu'il, en soit, le Bienheureux Yves gouverna cette Abbaïe de faint Quentin de Beauvais pendant l'espace de quatorze ans, & la rendit fi florifssante, qu'elle devint la mere de beaucoup d'autres Maisons où l'on voulut avoir Niij |